Pacific Palisades
Guillaume Corbeil
Une création des Songes turbulents, compagnie de création en coproduction avec l’Espace Jean Legendre et le Théâtre du Trillium et en codiffusion avec le Centre du Théâtre d’Aujourd’hui
Salle Jean-Claude-Germain
18 octobre au 5 novembre 2022
1 h 15 sans entracte
Texte
En 2015, Jeffrey Alan Lash, qui prétend être mi-homme mi-extraterrestre et travailler pour les services secrets américains, est retrouvé mort dans sa voiture. Des millions de dollars en armes, munitions et argent comptant sont découverts dans son garage. Fasciné par ce fait divers incongru, un homme prend l’avion pour Los Angeles afin d’enquêter sur cet individu mystérieux. En croisant sur son chemin de nombreuses figures ayant gravité autour de Lash, il découvre progressivement les multiples identités de l’intrigant fabulateur.
Guillaume Corbeil joue avec les codes du théâtre documentaire et propose avec Pacific Palisades un thriller halluciné qui rappelle le délire de Lash. Avec la complicité de l’interprète Evelyne de la Chenelière, le metteur en scène Florent Siaud en tire un roadtrip scénique captivant qui nous rappelle que les pouvoirs de la fiction sont plus fascinants et inquiétants que jamais dans notre monde en plein bouleversement.
Interprétation
Mot de l’auteur
Les preuves de l’impossible
Au mois d’août 2015, alors que je me laisse dériver sur Internet, je tombe sur l’histoire de Jeffrey Alan Lash. Retrouvé mort à Los Angeles, il avait convaincu son entourage qu’il était un agent secret extraterrestre. Si au départ l’histoire me faisait sourire, les jours passaient et je me surprenais à y repenser. Ce qui me fascinait, c’était que Lash détenait les preuves de son délire. Dans le garage de son condo et dans des entrepôts, la police avait trouvé mille deux cents semi-automatiques, pour une valeur de trois millions de dollars, 250 000$ en liquide et des voitures modifiées pour aller sous l’eau et traverser le désert. Officiellement, Jeffrey Alan Lash n’avait pas d’emploi. Aucun revenu.
Je voyais en lui une métaphore de l’artiste, quelqu’un qui était parvenu à matérialiser dans la réalité les objets de son imaginaire. J’ai raconté l’histoire à mes amis, personne ne comprenait pourquoi je m’intéressais à une affaire aussi sordide. Je me suis mis à lire sur l’enquête, puis à écrire sans trop savoir quoi – un film ou une pièce de théâtre – et je suis finalement parti à Los Angeles, pays où on fabrique les histoires les plus folles, dans l’espoir de découvrir la vérité à propos de celui que je voyais comme un Don Quichotte contemporain.
Si j’ai souvent pensé abandonner ce projet, j’avais la conviction profonde que l’affaire Lash racontait autre chose, qu’elle cachait un sens qui allait pouvoir m’éclairer sur l’Amérique, notre rapport à la fiction et notre besoin insatiable d’avoir quelque chose d’autre que le réel pour arriver à habiter le réel.
Ce soir, je vous raconte le voyage qui m’a mené jusque dans l’antre de la bête, celle qui nous promet de réaliser nos rêves et d’échapper à nous-mêmes.
Je m’en voudrais de ne pas remercier les personnes qui m’ont permis d’arriver au fil d’arrivée en un seul morceau : Florent Siaud, Évelyne de la Chenelière, Sara Dion, Catherine Dan, Christian Giriat, Marc-Antoine Brisson et Patrick Dupuis.
— Guillaume Corbeil
Mot du metteur en scène
Je ne sais plus ce que je sais
Écrit avant la pandémie, de 2017 à 2020, par Guillaume Corbeil, Pacific Palisades part d’un intrigant fait divers américain et éclaire aujourd’hui d’une lumière imprévu les remous qui dérangent notre monde.
Le texte prend la figure dérangeante de Lash comme point de départ inattendu, pour se demander : à une époque où la pandémie nous impose un quotidien soit confiné soit propice au repli sur soi, n’est-ce pas grâce aux ressources de l’imagination, du récit et plus globalement de l’art que nous pouvons trouver du sens à nos existences et apaiser nos angoisses de mort ravivées par les épreuves déboussolantes que nous traversons actuellement ? Revers de la médaille : parfois, la fiction ne contribue-t-elle pas à manipuler les nouvelles ou reconstruire à l’infini des mondes parallèles de vérité ?
Partant d’un style documentaire pour finir dans une atmosphère cinématographique, la pièce scrute le thème de la fiction dans ses dimensions contradictoires. Braquant les projecteurs sur la manière dont les notions de réel, de mensonge, d’illusion, de vrai et de faux se sont gravement brouillées à l’ère des faits alternatifs, la proposition s’incarne ici à travers le jeu insaisissable de la comédienne Evelyne de la Chenelière, qui endosse avec aplomb l’incarnation de plusieurs personnages. Après notre mise en scène de 4.48 Psychose de Sarah Kane, ce second seul en scène témoigne encore de notre besoin fondamental de questionner les frontières fondamentalement équivoques entre les genres et les territoires intimes. Placée sous le signe de la métamorphose continuelle, l’interprétation étrange d’Evelyne de la Chenelière est portée par la conception sonore immersive de Julien Eclancher, les éclairages en clair-obscur de Nicolas Descôteaux, les vidéos quasiment lynchéennes de David Ricard, et le vaste décor bleu turquoise de Romain Fabre, dont les strates se déploient sous nos yeux comme un secrétaire aux tiroirs secrets. Ici, les couches de réalité s’effeuillent comme des pelures d’oignon, tandis que l’enquête se fait quête et nous renvoie finalement à nos propres recherches existentielles. Ici, rien ne se résout. Ce sont les questions qui pleuvent en nous.
— Florent Siaud
Mot de l’interprète
Exister à l’autre
Depuis que je fais du théâtre, on m’a souvent demandé si je me considérais comme une écrivaine qui joue, ou comme une actrice qui écrit.
Je n’ai jamais su répondre.
Tout ce que je suis en mesure d’affirmer, c’est qu’aujourd’hui je ne crois qu’au corps. Le corps nous précède en tout. C’est l’imagination qui rejoint le corps, et non l’inverse. Le corps fait l’écriture autant qu’il l’incarne. De la même manière, l’empathie n’est pas tant une posture morale que corporelle, et l’amour est d’abord une curiosité éprouvée
par le corps.
Le théâtre ne cesse de me rappeler que c’est par le corps qu’on cherche l’autre, et par le corps qu’on le rejoint. Et qu’il y a donc une vérité dans le geste emprunté, par lequel on saisit l’autre autant qu’il nous déborde. Car les rencontres véritables altèrent le corps, le modifient, le modulent. Pas forcément dans de spectaculaires métamorphoses, mais souvent dans de petites inflexions, de légers infléchissements, tropismes délicats qui témoignent de notre élan irrésistible vers l’autre.
Le théâtre, pour moi, c’est l’art d’exister à l’autre. Une manière de concentrer, sur une scène, notre vibration quotidienne avec le monde. Vibration qui rappelle que si la solitude est originelle, l’hospitalité l’est tout autant.
Avec Pacific Palisades, Guillaume Corbeil nous offre une partition prodigieuse qui nous parle de théâtre sans jamais en faire le sujet. Sa langue crée des mondes où cohabitent l’importance et la légèreté, l’engagement et la décontraction, dans un récit qui oscille entre le témoignage et la reconstitution, la confession et l’invention, la fabrication d’un présent pur où, comme le dit si bien Florent Siaud, l’actrice entretient une « conversation conteuse » avec le public, et les épiphanies sensuelles qui en suspendent le cours. Mon corps est très heureux d’en être transformé.
Précisément parce que « je est un autre », nous sommes tous, ce soir, Guillaume Corbeil dans ses contours mouvants et ses possibles infinis.
Bien à vous,
— Evelyne de la Chenelière
Les songes turbulents
À travers des objets scéniques où le réel cohabite avec l’irrationnel, Les songes turbulents scrutent les mécanismes inconscients de nos comportements quotidiens et s’intéressent aux désirs inavoués ainsi qu’aux normes sociales influençant nos actions. En montant des auteurs comme Müller, Kane ou Viripaev, ils font résonner des réflexions existentielles à travers des écritures puissamment maîtrisées, où le politique est lié au poétique et où l’humanité est peinte dans sa complexité et ses contradictions.
La démarche artistique de la compagnie a fait l’objet d’un dossier de 28 pages dans la revue L’Annuaire théâtral : ce dossier a remporté le prix Jean-Cléo Godin 2018 de l’Association canadienne de recherche théâtrale, qui récompense le meilleur article de l’année en études théâtrales. La quasi-totalité des spectacles produits ou co-produits par la compagnie ont été finalistes ou lauréats aux prix de la critique du Québec (AQCT) dans les catégories meilleur spectacle, meilleure mise en scène, meilleure interprétation féminine ou meilleure interprétation masculine.
Remerciements et soutien
Pacific Palisades a été créé avec le soutien du Centre culturel canadien, du Conseil des arts de Montréal, du Conseil des arts et des lettres du Québec, du Conseil des arts du Canada, de la Région Hauts-de-France, du DRAC Hauts-de-France, du Département de l’Oise, du CEAD, de La Chartreuse et des Francophonies du Limousin.
La production remercie Daniel Brière, Pierre-Antoine Lafon Simard et Juliette Dumaine.
En tournée
12 novembre au 4 décembre 2021
Paris (France)
Théâtre Paris-Villette
7 décembre 2021
Compiègne (France)
Espace Jean Legendre
5 au 8 octobre 2022
Ottawa (Ontario)
Le Trillium – La Nouvelle Scène Gilles Desjardins
Images
20 octobre 2022
Les photos du spectacle
Images
17 octobre 2022
Affiches
Équipe de création
Scénographie et costumes
Lumière
Musique
Vidéo
Conseil dramaturgique
Direction technique
Direction de production
Corps titan (titre de survie)
Audrey Talbot
Salle Michelle-Rossignol
6 au 24 septembre 2022
Lequel est un Basquiat
Philippe Racine
Salle Jean-Claude-Germain
13 septembre au 8 octobre 2022
Cyclorama
Laurence Dauphinais
Théâtre Centaur et salle Michelle-Rossignol
11 octobre au 6 novembre 2022
Le virus et la proie
Pierre Lefebvre
Salle Michelle-Rossignol
30 novembre au 2 décembre 2022
Maurice
Anne-Marie Olivier
Salle Jean-Claude-Germain
16 janvier au 11 février 2023
Clandestines
Marie-Ève Milot et Marie-Claude St-Laurent
Salle Michelle-Rossignol
24 janvier au 11 février 2023
Pisser debout sans lever sa jupe
Olivier Arteau
Salle Michelle-Rossignol
2 au 11 mars 2023
Beau gars
Erin Shields
Salle Jean-Claude-Germain
14 mars au 8 avril 2023
Les filles du Saint-Laurent
Rébecca Déraspe en collaboration avec Annick Lefebvre
4 avril au 3 mai 2023
Je viendrai moins souvent
Camille Paré-Poirier
Salle Jean-Claude-Germain
25 avril au 18 mai 2023
Abonnement
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